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Les invendus

Réflexions sur «les invendus» en France et en Nouvelle Calédonie

Récemment, dans Les Nouvelles Calédoniennes (LNC), une lectrice s’indignait de l’effroyable gâchis que représentent les invendus, alimentaires surtout, détruits presque systématiquement par la grande distribution. De même, une utilisatrice du Forum des consommateurs de l’Union des Consommateurs de Nouvelle Calédonie », (UFC-NC) s’interrogeait sur les raisons pour lesquelles, les produits de consommation proches de la DLC (date limite de consommation) promis à son fils qui faisait un intérim dans « un hyper de Kaméré » avaient été jetés dans la benne à ordures.
Nous avons voulu en savoir plus et nous avons donc fait un petit tour sur le net. Voilà ce qu’on peut y lire :
D’abord le témoignage d’un autre employé d’une grande surface :

« Quand je travaillais dans un supermarché, les invendus (retirés 3 jours avant la date de péremption), étaient jetés à la poubelle après avoir été aspergés d’eau de javel. »

Puis cet article de Nice Matin du 13 février expliquant les raisons de cette destruction :

« Pourquoi les grandes surfaces arrosent la nourriture invendue de javel au lieu de la donner aux nécessiteux ?
C’est simple, avant les supermarchés laissaient les clochards récupérer la nourriture n’étant plus consommable, en fonction de la DLC (date limite de consommation). Et un jour, fatalement, quelqu’un a fini par être victime d’une intoxication alimentaire. Suite à cela, un procès à été intenté à la grande surface ayant laissé le clochard récupérer de la nourriture avariée, et ce, avec le soutien d’associations d’assistanat. La grande surface a été condamnée pour mise en danger de la vie d’autrui et empoisonnement…si le clochard était décédé, on aurait parlé d’homicide involontaire…
Dès lors, pour ne plus avoir de problèmes, on considère que, puisque la nourriture n’est plus vendable, car n’étant plus consommable, elle doit être jetée, et pour éviter que certains ne s’empoisonnent avec, elle doit être détruite pour préserver le bien de tous. »


C’est une argumentation qui se tient, évidemment. Ce serait donc pour l’intérêt du consommateur que de telles pratiques existent. Mais on ne parle là que de nourriture qui n’est « plus jugée consommable », les produits frais, légumes, viandes, par exemple. Pas de réponse précise concernant les nombreux autres produits « dont la date limite optimale d’utilisation (DLUO) est dépassée, mais qui restent comestibles sans danger pour la santé »
Dans l’article des LNC consacré aux invendus un autre débat s’installait : les grandes surfaces donnent-elles leurs produits encore consommables aux associations caritatives en Nouvelle Calédonie. Pas de réponse claire à la question. On pouvait y lire qu’un chef de rayon prétendait qu’elles n’en faisaient pas la demande, un autre affirmant que toutes ces demandes étaient systématiquement rejetées.
Alors que faire ?
Que font les dirigeants de la grande distribution en France? D’abord, ils les soldent progressivement. Voilà ce qu’on pouvait lire dans Nice Matin du 13 février :


« Tout commerçant, grand ou petit, n’a qu’une obsession : qu’il ne lui reste rien après la période de démarque. S’il y parvient, c’est gagné. « Idéalement, il faut que tout parte en soldes », explique Christophe Cherpozat, directeur adjoint d’Auchan-la-Trinité. « Par exemple pour le textile, on fait une première démarque, une deuxième, une troisième et si nécessaire on passe à ce que l’on appelle les prix ronds. On propose des affaires à 0,50 c, 1, 2 ou 3 € alors que la marchandise était au départ à 5, 6 ou 10 €. Notre seule question, c’est comment vais-je faire partir tout ça ? »


Ou dans la rubrique «Questions-Réponses» de Yahoo :


« Quand les paquets de corn-flakes ont du mal à partir, les magasins commencent à les mettre en tête de gondole, et à communiquer sur le thème « cinq paquets achetés, le sixième gratuit ».
Deuxième démarque : les bacs à « date limite de consommation (DLC) courte », où l’on trouve yaourts et jambons en tranche qui n’ont plus que quelques jours devant eux. « Au rayon crèmerie, on retire les articles 5 jours avant la DLC », explique Thierry Baumann, coordinateur qualité de l’hypermarché Cora de Haguenau. Avec une réduction de -50% pour le client.

Mais les grandes surfaces, en France, les donnent aussi aux associations caritatives :

« En France, les supermarchés font également don des invendus par le biais des associations. Ainsi, les bénévoles des Banques alimentaires collectent chaque jour des denrées retirées des linéaires mais dont les dates de consommation ne sont pas dépassées, explique Laurence Champier, responsable de la communication de la Fédération française des banques alimentaires (FFBA). «La grande distribution représente environ 30% de nos approvisionnements, nous travaillons avec quasiment toutes les enseignes», précise-t-elle. Les dons aux associations sont en général des denrées dont la date limite optimale d’utilisation (DLUO) est dépassée mais qui restent comestibles sans danger pour la santé, ou qui sont retirées des rayons 48 heures ou 72 heures avant la date limite de consommation (DLC).» (Le journalduNet.com)


Il semble donc qu’en NC, comme on pouvait le lire dans « Les Infos » du 24 février sous la plume de Gaël Lagadec, Maitre de Conférences à l’UNC, la cherté de la vie soit un « choix de société » :


« Comme les entreprises maximisent leurs profits grâce à la frange aisée de la population, la population pauvre est doublement marginalisée, ce qui nourrit un cercle vicieux entre les surprofits et les inégalités » Comment les produits peuvent-ils être ainsi majorés ? « La réponse à cette interrogation est donnée par l’Autorité de la concurrence qui met en avant la coexistence de deux demandes, correspondant à deux populations, dont la première, aisée ou très aisée, est servie commercialement, et la seconde, pas ou peu solvable, est laissée à l’abandon »


La boucle est donc bouclée.. En NC si les invendus ne sont pas donnés aux associations caritatives et presque jamais données ou vendues au rabais aux employés de la grande distribution, c’est qu’il s’agit d’un « choix de société » c’est-à-dire qu’on préfère vendre cher, très cher, aux riches plutôt que de vendre à des prix raisonnables aux pauvres. La marge bénéficiaire étant déjà faite avec les riches, pourquoi faire des efforts pour les pauvres ?
Ce à quoi ne semblent pas réfléchir nos décideurs, commerçants ou politiques, c’est qu’on suscite ainsi des frustrations chez ces plus pauvres ( 53.000 personnes en Calédonie, soit le cinquième de la population qui ne gagne que la moitié du SMG, d’après l’ISEE), qui risquent de créer, à terme, des troubles sociaux. La grande distribution se tire une balle dans le pied.
Mais au-delà du fait qu’en détruisant une partie de son stock elle va à l’encontre de ses propres intérêts, le problème est qu’elle participe ainsi à l’égoïsme aveugle des grandes multinationales qui rançonnent de plus en plus impitoyablement les plus démunis.
Ils en oublient ce qu’écrivait Dostoïesvski dans « L’idiot » : « La compassion est la loi essentielle, la loi unique peut-être, de l’existence de toute humanité ». Cet oubli leur sera peut-être fatal
!
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