Une réglementation très insuffisante
Comme le prouve notre test sur 52 fournitures scolaires, plus de la moitié contiennent trop de substances toxiques. En cause principalement, l’absence d’une réglementation spécifique sur ces produits pourtant utilisés quotidiennement par les enfants.
→ Test Que Choisir : Substances nocives dans les fournitures scolaires
Des phtalates classés perturbateurs endocriniens, des impuretés cancérogènes probables, du formaldéhyde cancérogène par inhalation et puissant irritant, en prime un conservateur si allergisant qu’il est l’ennemi numéro un des dermatologues et allergologues : voilà à quoi nous risquons d’exposer les enfants en leur achetant des fournitures scolaires. Les plus optimistes retiendront peut-être que sur les 52 produits testés, 19 ne contiennent aucun composé nocif pour la santé ou seulement à dose infinitésimale. Mais, en magasin, c’est la roulette russe. Rien ne distingue, par exemple, un crayon à papier ou des crayons de couleur que l’enfant mâchouillera sans risques de ceux avec lesquels il ingurgitera des phtalates. Même chose avec les cartouches d’encre. Alors que les élèves se mettent souvent de l’encre sur les doigts, elles contiennent de la MIT, un puissant allergène par contact. On pourrait continuer avec d’autres produits sélectionnés, tels les stylos-billes, colles à paillettes ou encore feutres et marqueurs parfumés, des articles qui font un tabac auprès des enfants. Certaines références sont acceptables, d’autres trop nocives pour leur santé, sans qu’on puisse repérer les unes et les autres.
PAS DE RÉGLEMENTATION PRÉCISE
Car l’énorme problème, c’est que les fournitures scolaires ne relèvent d’aucune réglementation précise, pas plus d’une directive européenne que d’un texte national. Contrairement à une multitude de produits, ces objets conçus pour les enfants n’ont même pas l’obligation de porter le marquage CE. Et alors que les cosmétiques, les détergents et bien d’autres catégories sont régis par une réglementation spécifique, les fournitures scolaires en sont dispensées. Elles sont juste tenues de répondre à « l’obligation générale de sécurité », le degré minimal de la réglementation. Pour des articles destinés à la vie quotidienne de la population la plus vulnérable, c’est aberrant.
L’absence de contraintes conduit d’ailleurs à des situations ubuesques. Notre sélection compte ainsi des colles à paillettes, très prisées des plus jeunes. Certaines portent le sigle CE, d’autres pas. Pourtant, aucune n’est en infraction. Mais les fabricants qui arborent le sigle CE ont choisi de faire répertorier ces produits en tant que jouets, ce qui leur impose de répondre à une réglementation stricte quand les autres se contentent de l’obligation générale de sécurité, bien moins contraignante. Bizarrement, en effet, quand il n’existe pas de directive sectorielle, les industriels choisissent sur quelle réglementation ils veulent se baser ! Dans notre sélection, alors que toutes les colles à paillettes analysées contiennent des conservateurs hautement allergisants, une seule a choisi de préciser qu’elle « peut entraîner une réaction allergique ».
Autre exemple de cacophonie réglementaire, la présence ou non de symboles de danger sur les emballages d’articles comparables. Certains sont étiquetés de logos inquiétants assortis d’avertissements qui le sont tout autant, comme « susceptible de provoquer le cancer ». De quoi hésiter avant de les acheter… surtout quand des concurrents dépourvus de symbole de danger inspirent confiance. Des parents vont se tourner vers eux, à tort !
LES INDUSTRIELS FONT CE QU’ILS VEULENT
Là encore les industriels ont toute liberté. Ils peuvent afficher les risques dans un souci de transparence en suivant la réglementation CLP (1), qui impose un étiquetage aux mélanges dangereux, ou préférer les cacher en se référant uniquement à la réglementation Reach (2). « Les stylos et marqueurs peuvent contenir des mélanges de substances chimiques classés dangereux par le règlement CLP, souligne la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Des fabricants considèrent que les instruments d’écriture répondent à la définition de combinaison d’un article et d’un mélange, alors que d’autres estiment qu’ils répondent à la définition d’un article au sens du règlement Reach. » À composition identique on étiquette les dangers dans la première situation, et dans la seconde, on en est dispensé !
Bref, en matière de réglementation, c’est le grand bazar dans les fournitures scolaires et bien peu de protection pour les enfants. Une réglementation unifiée s’impose, les écoliers et leurs parents ont le droit d’être informés des risques que présentent des produits utilisés tout au long de l’année.
cf: quechoisir.org