À la fin de l’année, la Commission européenne doit se positionner sur le futur étiquetage nutritionnel harmonisé et obligatoire à l’échelon européen.
L’UFC-Que Choisir, tout comme le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC), ainsi que la communauté scientifique, plaident pour que le Nutri-Score soit retenu par la Commission. Dans cette dernière ligne droite avant l’annonce de la Commission, j’assiste, estomaqué, à un déferlement d’arguments anti Nutri-Score plus fallacieux les uns que les autres, souvent pilotés par le lobby des industriels de l’alimentation opposés à ce que les consommateurs puissent connaître d’un coup d’œil la qualité nutritionnelle de leurs produits. Heureusement, plusieurs études ont récemment renvoyé dans leurs cordes les opposants. Illustrations récentes…
Une tribune signée par plusieurs parlementaires français entendant protéger notre patrimoine gastronomique contre le Nutri-Score a ainsi été publiée dans La Dépêche le 10 mai dernier. Ces parlementaires y déplorent que « la plupart des produits qui appartiennent à notre histoire et à nos terroirs, présenteraient la pire note, « E », destinée à faire peur et à éloigner le consommateur ». De bonne foi ? Instrumentalisés ? Cela questionne, mais reste affligeant que des parlementaires se fassent les relais serviles de dénaturations aussi grossières de la réalité.
Qu’est-ce qui me pousse à dire ça ? Tout simplement l’enquête de terrain menée par les associations locales de l’UFC-Que Choisir, publiée quelques jours auparavant, qui tord le cou à cette idée en démontrant que le Nutri-Score est (très) loin de porter ombrage aux produits de nos terroirs.
La « plupart » de ces produits présenteraient la pire note E ? Sur la base de l’étude des valeurs nutritionnelles de 588 produits traditionnels, seuls 13 % d’entre eux présentent un Nutri-Score E ! Dans leur grande majorité (62 %), les produits du terroir étudiés présentent même des Nutri-Score A, B et C, indiquant que leur consommation est très souvent encouragée au titre de leur qualité nutritionnelle.
Autre alibi anti Nutri-Score, l’autorité européenne de sécurité des aliments affirmerait que cet étiquetage serait inefficace en matière de prévention de l’obésité, dont l’expansion ne serait qu’une affaire de surconsommation. Rien n’est plus faux ! Cette autorité a elle-même dû démentir, et réagir aussi fermement que publiquement, pour dénoncer cette contre-vérité, avant de réaffirmer que l’obésité avait pour principale cause des apports excessifs en sucres ajoutés et en graisse saturée, que le Nutri-Score prend justement en compte.
Toutes ces fausses allégations ne sont autres que celles utilisées par des lobbys industriels. Ils avaient été utilisés par un lobbyiste de la No-Nutriscore Alliance dans le cadre d’un séminaire de travail sur le Nutri-Score organisé au Parlement européen…
Je pourrais vous lister ici les pseudo-arguments avancés par ce lobbyiste au cours de son intervention qui relève du tragicomique, mais je ne voudrais pas divulgâcher. La députée européenne Michèle Rivasi, qui coorganisait ce séminaire, vient en effet de mettre sur son site l’enregistrement complet de l’événement. Ce lobbyiste prétend, sans convaincre grand monde, agir « bénévolement » afin de préserver ses enfants (et peut-être l’humanité, qui sait) du Nutri-Score.
À la suite de l’intervention bravache du lobbyiste, vous constaterez que son argumentation est balayée, dans son ensemble, aussi bien par les représentants des consommateurs que par les autorités scientifiques. Et c’est là selon moi le point central de la séquence : il ne faut pas laisser le champ libre aux lobbyistes anti Nutri-Score qui osent tout (et c’est à ça qu’on les reconnaît). Il faut débusquer les faux arguments, les contrer un à un afin d’empêcher que les attaques non fondées contre le Nutri-Score puissent infuser dans les esprits des personnes qui décideront, au niveau européen, du devenir de cet étiquetage nutritionnel. Il s’agit au contraire de mettre en avant les études et avis d’autorités qui soulignent la pertinence du Nutri-Score en termes d’information des consommateurs, d’évolutions salvatrices des recettes industrielles, et au final de santé publique.
À ce sujet, de nouvelles études scientifiques viennent de paraître. Santé Publique France a ainsi rendu publique une étude démontrant la bonne connaissance et l’impact positif du Nutri-Score s’agissant du comportement alimentaire des adolescents. Alors que l’OMS alerte sur le caractère épidémique de l’obésité, particulièrement infantile, en Europe, cette étude est d’un apport crucial dans la réflexion. De même, l’Institut de recherche et d’innovation IRI a analysé les marchés et a pu constater que la part des produits mal notés par le Nutri-Score avait baissé, soulignant, une nouvelle fois, son impact positif mais aussi le fait que le Nutri-Score avait permis une amélioration de la composition de nombreux produits.
Ces données sont de précieux éclairages dans notre combat contre la désinformation autour du Nutri-Score, en espérant qu’ils percutent l’entendement des décideurs, en particulier européens. En tout cas l’UFC-Que Choisir fait partie des acteurs qui s’y emploient activement, et avec détermination.