Causes à l’origine des coupures électriques des 08 et 20/01/2024.
Mesdames, Messieurs les membres de l’UFC QUE CHOISIR,
Vous avez sollicité Enercal, à l’appui d’un communiqué, pour comprendre les causes à l’origine des coupures électriques des 08 et 20 janvier derniers et obtenir des réponses à des questions plus générales sur l’électricité en Nouvelle-Calédonie.
Vous voudrez bien trouver, ci-après, la formalisation écrite des réponses que j’ai pu apporter à Messieurs Philippe LASSAUCE et Denis DRAILLARD lors de notre échange du 06 février dernier.
Que s’est-il passé les 08 et 20 janvier 2024 ?
Les 08 et 20 janvier derniers, un dysfonctionnement industriel au niveau des fours de la SLN
a empêché Enercal d’alimenter en électricité les communes situées au Sud de Tontouta. Les incidents
ont provoqué une rupture de l’alimentation électrique de 80 000 foyers et entreprises.
– Le 08 janvier, la foudre a créé une instabilité sur le réseau. Habituellement, la présence de l’usine et de la Centrale Accostée Temporaire (CAT) de la SLN sur le réseau absorbe ce type d’instabilité et permet la continuité de l’alimentation électrique des calédoniens. Cela n’a pas été le cas le 08 janvier : les fours et la CAT, à pleine puissance, n’ont anormalement pas supporté la perturbation et se sont automatiquement déconnectés du réseau, provoquant l’arrêt des moyens de production du Sud par mesure de protection automatique des infrastructures publiques de l’électricité.
– Le 20 janvier, ce sont les casses à répétition d’électrodes dans les fours qui ont provoqué un déséquilibre électro-technique provoquant l’arrêt de la CAT, sa déconnexion au réseau et l’arrêt des autres moyens de production du Sud par mesure de sécurité automatique.
A quoi sert la CAT ?
L’usine SLN de Doniambo est alimentée en électricité par l’aménagement hydroélectrique de Yaté, propriété de la Nouvelle-Calédonie exploitée par Enercal (10%) et la CAT qui appartient à la SLN (90%).
La CAT joue parfaitement son rôle de moyen de production électrique pour l’usine SLN de Doniambo.
Les épisodes des 08 et 20 janvier ont laissé apparaître qu’elle rendait moins de service de stabilité du réseau électrique que l’ancienne centrale B.
Comment un problème sur la SLN peut-il rejaillir sur tout le Sud de la Grande Terre ?
L’usine SLN de Doniambo et la CAT sont connectées au réseau de Transport de la grande terre pour :
– Alimenter l’usine à partir de la production de Yaté et des excédents d’énergie renouvelable photovoltaïque.
– Acheter de l’électricité à la SLN pour les particuliers et professionnels calédoniens en cas d’insuffisance des moyens de production destinés aux calédoniens ou pour réduire les coûts d’achat d’énergie à certains moments.
– Garantir la stabilité de la fréquence sur le réseau, c’est-à-dire maintenir l’équilibre à tout instant entre la production et la consommation grâce à des contrats spécifiques signés avec la SLN (« délestage » et « effacement » des fours).
Les coupures des 08 et 20 janvier sont le résultat du fonctionnement correct des mesures de protection automatiques des réseaux et des moyens de production situés à proximité des défauts : la foudre à Païta le 08 et les fours de la SLN les 08 et 20 janvier.
Pourquoi est-ce si long de rétablir l’alimentation électrique avec les moyens d’aujourd’hui ?
Parce que la production et l’acheminement de l’électricité restent basés sur des principes physiques incontournables.
Une fois les réseaux déconnectés, les moyens de production à l’arrêt et le problème identifié, il faut :
– Isoler les sources du problème.
– Relancer les moyens de production thermique — 30 minutes à 2 heures. Les moyens de production renouvelable intermittents sont déconnectés du réseau pour ne pas créer de nouvelles interférences. Ils ne peuvent pas relancer un réseau électrique.
– Magnétiser les transformateurs du réseau Haute Tension, c’est-à-dire mettre à nouveau de la tension sans consommation correspondante – en moyenne 10 minutes par transformateur (4 concernés les 08 et 20 janvier).
– Assurer progressivement l’alimentation en électricité des points de livraison Enercal et EEC dans les communes en équilibrant la production et la consommation à chaque instant.
– Puis chaque distributeur réalimente en électricité son réseau, puis livre ses clients.
L’unicité des fonctions Transport et Distribution sur les concessions de distribution
Enercal permet d’être plus rapide.
Qui est responsable de la panne ?
Les causes des incidents sont connues mais la coupure d’électricité est due à un fonctionnement correct des automatismes de protection des infrastructures de réseau et de production électrique.
Peut-on craindre de nouvelles coupures de cette ampleur ?
Un consommateur aussi gros que la SLN, connecté au réseau public, doit garantir qu’il ne génère pas d’interférences avec un réseau public. La SLN a fait le nécessaire avant qu’Enercal ne la reconnecte au réseau, 2 jours après la coupure du 20 janvier.
Pourquoi avons-nous besoin de deux opérateurs ?
La Production d’électricité est un marché concurrentiel composé d’une dizaine d’opérateurs en Nouvelle-Calédonie. Pour exploiter un moyen de production, les projets sont choisis par le gouvernement sur appel d’offres.
Le Transport de l’électricité est, comme dans tous les pays du monde, géré par un opérateur unique qui achète l’électricité aux producteurs et la vend aux distributeurs. Il est alors garant de l’équilibre en temps réel entre la production et la consommation. Cette mission en Nouvelle-Calédonie est confiée à Enercal.
La Distribution, sur le territoire, est un marché concurrentiel entre deux opérateurs EEC- ENGIE et Enercal. Les communes choisissent leur distributeur sur appel d’offres pour entretenir leurs réseaux, livrer l’électricité aux administrés et gérer les dossiers clients.
La présence d’un seul opérateur calédonien pour le Transport et la Distribution, comme l’est aujourd’hui Enercal sur 25 des 33 communes, permettrait à moyen/long terme :
– Techniquement, une amélioration de la qualité de fourniture grâce à la synergie Transport/Distribution.
– Économiquement, des économies d’échelle à hauteur de quelques centaines de millions CFP par an grâce à l’optimisation de certaines fonctions aujourd’hui redondantes et la garantie que les revenus soient en totalité réintégrés dans l’électricité calédonienne.
Toutefois, il faut noter qu’une fusion Transporteur/Distributeur unique n’est pas une solution d’urgence au déficit annuel de 5 milliards CFP par an de l’électricité calédonienne car les économies d’échelle ne peuvent être réalisées immédiatement.
Quelle est la situation de l’électricité calédonienne ?
Techniquement, la Nouvelle-Calédonie a entamé sa Transition Énergétique.
Aujourd’hui, l’électricité livrée aux particuliers et professionnels calédoniens est constituée à parts égales d’énergies thermiques et d’énergies renouvelables, contre respectivement 90% / 10% il y a moins de 10 ans.
Économiquement, l’électricité calédonienne est déficitaire.
Aujourd’hui, l’électricité vendue en moyenne à 35 CFP/kWh coûte en réalité 42 CFP/kKWh.
La Transition Energétique a déjà coûté 12,5 milliards CFP : 9 milliards CFP de surcoûts des énergies renouvelables et 3,5 milliards CFP d’investissements pour adapter les infrastructures de réseau.
Depuis 2022, la guerre en Ukraine a renchéri le coût des combustibles fossiles de 5 milliards CFP/an.
Les gouvernements, qui fixent l’ensemble des prix de l’électricité calédonienne, font le choix de ne pas reporter ces coûts sur les prix de vente aux consommateurs, hormis les 11% d’augmentation votés en 2022-2023. Ils demandent à Enercal Transport de vendre à perte aux Distributeurs et doivent rembourser Enercal de ce manque à gagner. Ce qui n’est pas fait.
À date, le gouvernement doit 13,2 milliards CFP à Enercal qui s’est endettée pour faire face.
Pourtant, pour que la Nouvelle-Calédonie se désensibilise des coûts des combustibles et stabilise les coûts de son électricité, Enercal doit pouvoir se désendetter et retrouver sa capacité d’investissements dans les socles de l’électricité de demain que sont :
– La production solaire : c’est aujourd’hui une énergie abondante et de moins en moins chère qui pourrait couvrir, avec l’hydroélectricité existante, les 2/3 des besoins.
– Le stockage : c’est la seule manière de contourner les défauts du solaire : production uniquement en journée quand il faut beau.
– Du thermique décarboné pour le tiers restant : c’est la seule manière de stabiliser les paramètres. électrotechniques de l’électricité et de parer aux aléas météos qui empêchent la production renouvelable (soleil, eau, vent).
Nous restons à la disposition d’UFC QUE CHOISIR pour toute question relevant de l’électricité calédonienne.
Vous remerciant pour votre confiance, nous vous prions de croire, Mesdames, Messieurs les membres de l’UFC QUE CHOISIR, en l’assurance de notre considération distinguée.
Le Directeur Général,
Jean-Gabriel FAGET
87, Avenue du Général de Gaulle – BP C1 – 98848 Nouméa Cedex – Nouvelle-Calédonie – Téléphone : (687) 250.250 – Fax : (687) 250.253
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