Le lien de cause à effet entre consommation d’aliments ultra-transformés et hausse de la mortalité semble modeste mais il est bien réel, selon une nouvelle étude française.
Un lien statistiquement établi
Des chercheurs français viennent de publier une vaste étude consacrée aux liens entre santé et aliments ultra-transformés (VOIR L’ÉTUDE EN BAS DE PAGE) Et leur verdict n’est pas vraiment celui auquel on s’attendait : le lien de cause à effet entre consommation d’ aliments ultra-transformés et mortalité est des plus minimes. Les résultats de cette étude de fond, réalisée auprès de 45.000 Français entre 2009 à 2017, viennent d’être publiés dans la revue de l’Association médicale américaine (Jama Internal Medicine).
Tous les six mois, les Français suivis dans le cadre de cette étude devaient enregistrer sur un questionnaire en ligne tout ce qu’ils avaient mangé et bu pendant trois périodes de 24 heures. Au bout de sept ans d’étude, 602 personnes étaient décédées, dont 219 d’un cancer. Les chercheurs ont alors analysé les données et ont constaté qu’une augmentation de 10% de la proportion d’aliments ultra-transformés dans l’alimentation correspondait à une augmentation de 15% de la mortalité. Pour autant, selon les chercheurs, le chiffre n’est pas l’élément le plus important, seul importe le lien de causalité statistiquement significatif.
La question des additifs et du style de vie
Pourquoi un tel lien ? En fait, les aliments ultra-transformés appartiennent à la catégorie 4 de la classification « Nova ». Cela veut dire que ces produits ont subi de nombreux procédés de transformation, dont un chauffage à haute température, et qu’ils contiennent des additifs, des émulsifiants, des texturants… Au final, ces plats ultra-transformés juste prêts à réchauffer sont plus riches en sel ou en sucre et pauvres en vitamines et en fibres. L’an dernier, l’étude NutriNet-Santé avait déjà constaté un plus grand nombre de cancers chez les consommateurs habituels de ces aliments.
Aujourd’hui, les aliments ultra-transformés représentent entre 25 et 50% de notre alimentation totale et envahissent littéralement les rayons des grands magasins. Les chercheurs posent, parmi les hypothèses du lien constaté entre ces aliments et la mortalité, la question des additifs utilisés pour préparer ces aliments. Mais les données de cette étude soulignent aussi une autre réalité, sociale cette fois et non médicale : ces aliments ultra-transformés sont consommés de façon disproportionnée par les personnes au niveau de revenus ou d’éducation faible, ou par les personnes vivant seules. Comme quoi, la santé est aussi une question sociétale et pas seulement médicale.
cf: le-mag.radins.com
Voici des explications de l’étude:
Leur étude, portant sur des dizaines de milliers de Français suivis de 2009 à 2017, a observé un lien modeste entre la consommation d’aliments ultra-transformés et le risque de décès pendant la période. Les résultats ont été publiés dans la revue de l’Association médicale américaine (Jama Internal Medicine).
« Il ne faut pas être alarmiste pour le public et dire qu’en mangeant un plat préparé on a un risque supplémentaire de 15% de mourir« , dit à l’AFP Mathilde Touvier, directrice de l’équipe de recherche en épidémiologie nutritionnelle à l’université Paris 13, qui gère la grande étude NutriNet-Santé avec des chercheurs de trois autres institutions (Inserm, Inra et CNAM).
« C’est une nouvelle pierre à l’édifice dans les recherches sur les liens entre aliments ultra-transformés et la santé« , dit-elle.
Etudier le lien entre l’alimentation et des maladies est extrêmement complexe, et les résultats sont souvent mal interprétés.
La même équipe française a publié l’an dernier une étude sur la nourriture bio et le risque de cancer. Un plus grand nombre de cancers avait été observé chez les personnes mangeant moins de bio, mais là encore, la méthodologie ne permettait pas de conclure de lien de causalité… Ce qui n’avait pas empêché de nombreux médias de titrer sans précaution sur les bienfaits du bio contre le cancer.
45.000 Français de plus de 45 ans, en majorité des femmes, ont participé à la nouvelle étude. Tous les six mois, ils devaient enregistrer sur un questionnaire en ligne tout ce qu’ils avaient mangé et bu pendant trois périodes de 24 heures.
Au bout de sept ans, environ 600 personnes étaient décédées. Les chercheurs ont ensuite décortiqué les données et se sont aperçus qu’une augmentation de 10% de la proportion d’aliments ultra-transformés dans l’alimentation correspondait à une augmentation de 15% de la mortalité.
Mais Mathilde Touvier avertit qu’il ne faut pas se focaliser sur le chiffre, ce qui compte est l’existence d’un lien statistiquement significatif. Et l’étude doit être interprétée dans un ensemble de travaux.
Comment expliquer un tel lien ?
Les aliments ultra-transformés appartiennent à la catégorie 4 de la classification « Nova » : ils ont subi plusieurs procédés de transformation, comme du chauffage à haute température, et incluent des additifs, des émulsifiants, des texturants… Un plat préparé congelé simple, sans additifs, n’en fait pas partie, mais la plupart des aliments ultra-transformés sont des plats prêts à réchauffer, plus riches en sel ou en sucre et pauvres en vitamines et en fibres.
L’an dernier, les chercheurs français avaient publié des résultats, toujours tirés de l’étude NutriNet-Santé, observant un plus grand nombre de cancers chez les gros consommateurs de ces aliments.
Comme il n’est pas possible, pour des raisons éthiques, de faire une expérience où on ferait manger ces aliments à une partie de la population mais pas à une autre, les études « observationnelles » sont la seule solution.
Il y a forcément des défauts : les gens sont plus ou moins précis dans le questionnaire auto-administré ; et de nombreux autres facteurs « invisibles » peuvent ne pas être pris en compte, même si les résultats sont ajustés par plusieurs critères socio-démographiques et la qualité générale de l’alimentation.
Reste à répondre à la question fondamentale : pourquoi ?
Parmi les hypothèses énumérées par les chercheurs : les additifs. Leur effet est étudié en laboratoire, sur des cellules et sur des rats, notamment dans un laboratoire de l’Institut national de la recherche agronomique.
L’étude de lundi est « un apport important à la littérature« , dit à l’AFP Casey Rebholz, professeure d’épidémiologie à l’université américaine Johns Hopkins, qui note que la méthodologie est de bonne qualité, malgré les limites inhérentes aux études de ce type.
Les données montrent aussi, insiste Nita Forouhi, professeure d’épidémiologie nutritionnelle à Cambridge, que les aliments ultra-transformés sont consommés de façon disproportionnée par les personnes à revenus ou à niveau d’éducation faibles, ou vivant seules. « Il faut en faire plus contre cette inégalité« , dit-elle.
cf:doctissimo.fr