Nous sommes régulièrement interrogés par la DAE sur des renouvellements de protection de marché. Nous venons de répondre à une demande, pour les prochaines 10 ans, concernant les bières de malt, exprimée par la société Le Froid.
Voici ce que nous avons répondu avec un avis très négatif :
« L’entreprise est spécialisée dans la fabrication de boissons alcoolisées (bières) ou à très forte teneur en sucre (sodas, caco-cola,…). A cet égard, si l’entreprise répond à une demande croissante des calédoniens force est de constater que ce sont pour des produits qui ne répondent pas aux critères de santé publique concernant l’alcoolisme et le diabète. Dès lors toute aide à cette entreprise visant à faciliter l’écoulement de ses produits serait contreproductive par rapport à une amélioration de la santé des calédoniens en général. Or la note présentée n’aborde à aucun moment ce point, bien au contraire puisqu’elle présente la production locale de bières comme contribuant à la sécurité alimentaire calédonienne.
L’entreprise relève qu’elle pourrait conférer une autonomie totale de la Nouvelle Calédonie en matière de production de bières, sodas, jus et eau, ceci revient à méconnaître les goûts de ses clients qui souhaitent une offre diversifiée avec des produits d’importation. De plus compte tenu de la nature des produits, nous ne percevons aucun intérêt du point de vue de la santé publique notamment à conférer à l’entreprise une situation d’exclusivité sur le territoire.
Concernant l’outil de production, il est relevé que l’entreprise est en capacité d’exporter vers le Vanuatu, Wallis et Futuna, le Japon et la France métropolitaine. Dès lors on peut considérer qu’elle a atteint un seuil de maturité et de compétitivité qui ne justifie plus d’une aide systématique face à ses concurrents.
L’entreprise indique qu’elle a consacré depuis sa création, une large part de ses moyens dans son outil industriel et on ne peut que l’en féliciter, mais il s’agit là d’une démarche tout-à-fait normale dans la vie d’une entreprise. Elle se présente comme respectueuse de l’environnement en ayant des démarches originales de récupération et recyclage de certains déchets et c’est tout à son honneur. Une telle démarche la situe dans la lignée des grandes entreprises internationales. Cependant ceci ne justifie pas en soi une mesure de protection sur la prochaine décennie, tout au plus pourrait-on envisager une aide ponctuelle à l’investissement si cela s’avérait nécessaire, mais nous considérons qu’elle ne relève pas des secteurs prioritaires à aider.
Enfin il revient de noter que les bières locales sont largement moins taxées que les bières d’importation, ce qui constitue en soi une aide à la production locale et une franche anomalie en matière de lutte contre l’alcoolisme.
Concernant les mesures sociales présentées, nous félicitons l’entreprise d’avoir mis en place des mesures incitatives pour son personnel dans la mesure où elle en avait les moyens. Cela rentre dans le cadre normal de la relation entre une entreprise et ses salariés, et ne peut en aucun cas justifier de mesures de protections de marché.
Enfin l’entreprise fait apparaître toutes ses contributions au tissu économique local. On peut penser qu’elle peut encore progresser par un développement de l’export sur toute la zone Pacifique, cependant un tel développement est totalement incompatible avec des protections de marché qui empêcheraient la réciprocité de l’importation de produits de ces pays.
On peut noter que l’entreprise, dans sa présentation, ne justifie à aucun endroit ce qu’apporterait la protection de marché demandée, ni les contreparties qu’elle apporterait : on est sur une logique de continuité qui n’a plus de sens économique pour une entreprise mature. »
cf : UFC Que choisir NC